La HAS élargit le périmètre de la 4e dose à certains patients de plus de 65 ans
PAR IRÈNE LACAMP -
PUBLIÉ LE 18/03/2022
La Haute autorité de Santé propose d’ouvrir la 4e dose de vaccin non seulement à tous les plus de 80 ans, comme l’avait décidé le gouvernement, mais aussi aux séniors de plus de 65 ans présentant un risque particulièrement élevé de forme grave.
Crédit photo : GARO/PHANIE
Depuis le début de la semaine, sur décision du ministère de la Santé, la 4e dose de vaccin anti-Covid-19 est ouverte à l’ensemble des séniors de plus de 80 ans ou vivant en Ehpad ou USLD. Mais ce 18 mars, la Haute autorité de Santé (HAS) va plus loin.
Une 4 dose pour les plus de 65 ans à risque "qui le souhaitent"
En effet, dans un avis publié cet après-midi, l’instance « prend acte de l’annonce gouvernementale » et propose « de rendre possible l’administration d’une seconde dose de rappel aux personnes de 65 ans et plus qui le souhaitent ; soit celles à très haut risque de forme sévère de la maladie, soit celles qui sont polypathologiques ». Et ce, dans le cadre « d’une décision médicale partagée ».
Pour justifier cette décision, la HAS avance des arguments similaires à ceux déjà soulignés par le Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale (COSV), suivi par le gouvernement. À savoir, au-delà du rebond épidémique actuel, une apparente baisse, au cours du temps, de l’efficacité du premier rappel chez les séniors. En effet, selon des données de vie réelle publiées par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) ainsi que des chiffres américains et britanniques, « la protection conférée par la dose de rappel commence à diminuer après 3 mois chez les personnes de 60 ans et plus », rapporte la HAS.
L’autorité sanitaire évoque également des données israéliennes, qui plaideraient en faveur non seulement de la bonne sécurité du second rappel, mais aussi de sa capacité à rétablir la protection vaccinale. « (Ces) données d’efficacité en vie réelle d’une deuxième dose de rappel montrent que celle-ci divise par 2 le taux d’infections confirmées et par 4 le taux de formes graves de la maladie », résume la HAS.
Un délai de 6 mois à respecter si possible
Seule précaution : alors que le gouvernement invite à proposer la 4e injection dès 3 mois après le premier rappel, la HAS conseille d’augmenter ce délai. Soit « de respecter de préférence un intervalle d’au moins 6 mois avec le premier rappel ». En cause : « l’efficacité vaccinale encore bonne (supérieure à 70 % sur les hospitalisations) 3 mois après le premier rappel, (…) la perspective d’un potentiel besoin de rappel additionnel à l’automne, et pour ne pas diminuer l’adhésion de la population à la vaccination par des rappels trop fréquents ».
De plus, l’autorité sanitaire exclut pour le moment un élargissement du périmètre de cette 4e dose au-delà des séniors. « La HAS considère qu’il n’est pas pertinent de recommander actuellement l’administration d’une seconde dose de rappel en population générale. » Et ce, du fait d’un recul encore limité sur l’intérêt de ce second rappel et au regard des « enjeux d’acceptabilité par la population de campagnes de rappels successives et rapprochées ».
Pas de second rappel en population générale en vue pour le moment
D’ailleurs, d’autres instances appellent à temporiser. Hier, l’Agence européenne du médicament (EMA) a ainsi exprimé une nouvelle fois ses doutes quant à l’intérêt du second rappel en population générale, considérant « qu'il n'y a pas encore suffisamment de preuves (..) pour étayer la recommandation d'une deuxième dose de rappel au sein de l'ensemble de la population ».
En outre, les quelques données disponibles chez les adultes jeunes apparaissent peu favorables à une extension de la cible de la 4e dose chez les moins de 65 ans. Professionnels de santé y compris. C’est du moins ce que suggère un essai clinique israélien conduit auprès d’un peu plus de 800 travailleurs de l’hôpital Sheba et dont les principaux résultats ont été décrits dans le NEJM cette semaine.
De fait, suite à la randomisation de ces professionnels de la santé pour recevoir soit une 4e dose de vaccin Pfizer (Comirnaty), soit une 4e dose de vaccin Moderna (Spikevax), soit un placebo, les auteurs de ce travail n’auraient observé que des « bénéfices (individuels) marginaux » par rapport au premier rappel.
Plus précisément, la réponse immunitaire associée à cette injection supplémentaire n’apparaîtrait pas supérieure à celle générée par le premier rappel – associé, lui, à des titres d’anticorps plus élevé que la primovaccination. De plus, la protection contre les formes symptomatiques de la maladie ne serait que faiblement améliorée après le second rappel.
Cette 4e dose ne semble pas non plus associée à des bénéfices collectifs, sur la dynamique de circulation virale. En effet, elle ne permettrait un gain d’efficacité que de 5 % environ vis-à-vis de la prévention de l’infection par le SARS-CoV-2. Que ce soit après la 3e dose ou la 4e dose, « la plupart des participants infectés étaient potentiellement infectieux, avec des charges virales relativement élevées », déplorent les auteurs.